sommeil au bureau

Bien connue pour réguler le sommeil, la mélatonine peut aussi être intéressante pour rester en forme à tout âge.

Est-elle indiquée dans votre cas ?
Cela dépend…

Récemment, la HAS a émis une mise en garde dans l’utilisation de la mélatonine, contre de possibles effets indésirables. En fait, il s’agit d’effets secondaires plutôt bénins chez des personnes utilisant la mélatonine pour améliorer leur sommeil.

Trois points nous paraissent ici importants pour cette hormone classée « complément alimentaire« , en vente libre dans beaucoup de pays :

1. la plupart du temps ces effets sont liés à la prise d’une dose trop importante pour la personne
2. si on doit comparer ces effets secondaires avec ceux des somnifères et hypnotiques largement prescrits par les médecins et utilisés par les patients, ils sont bien moindres et moins graves
3. la mélatonine, même si elle peut avoir des effets sur le sommeil, n’est pas un somnifère et ne doit pas être prise comme tel. C’est plutôt un régulateur veille/sommeil, ce qui est plus subtil. Elle fera mieux dormir dans certains cas mais il faut la prendre avec discernement. Voyons cela de plus près.

La mélatonine est avant tout une hormone naturelle

L’hormone du rythme veille/sommeil

Elle est fabriquée par la glande pinéale (ou épiphyse), située au centre du cerveau. Sa particularité est d’être produite pendant les périodes nocturnes, alors que la lumière du jour va empêcher sa fabrication (tout comme la lumière artificielle pendant la nuit).

Alors qu’on a longtemps cru qu’elle était passive, la mélatonine agit sur les glandes endocrines produisant d’autres hormones dont l’hormone de croissance, intéressante en anti-âge. Elle diminue fortement en vieillissant, comme beaucoup d’autres hormones, de façon variable selon les individus. Sa production diminue aussi l’hiver, ainsi qu’avec une mauvaise hygiène de vie, et avec certains médicaments.

Il est intéressant de voir qu’elle est produite aussi chez d’autres espèces, notamment végétales qui peuvent donc être une source d’apport naturel : noix, riz, orge, tomates, fraises…

La mélatonine comme inducteur du sommeil

dormir bienElle est bien connue pour aider à l’endormissement et restaurer le sommeil en cas de décalage horaire (2). Elle ralentit l’activité cérébrale. Elle peut aussi aider au sevrage des médicaments somnifères (bien plus toxiques et addictifs).

Néanmoins, d’après une étude de 2001, les effets sur le temps d’endormissement seraient plus marqués chez les sujets de plus de 55 ans. Ceci semble logique puisque ces sujets ont des niveaux de mélatonine bien inférieurs à ceux des plus jeunes.

Une hormone miracle ?

En 1995 la mélatonine fut présentée comme « hormone miracle » après la parution d’un livre intitulé « Mélatonine : le merveilleux remède naturel pour votre corps ». Aujourd’hui, les avis sont plus réservés mais il s’avère que cette hormone possède réellement des effets contre les troubles et maladies liés au vieillissement.

Notons que le Pr J.B. Fourtillan a découvert en 1994 que la mélatonine fonctionnait avec 2 autres hormones : la valentonine (sédative) et la 6-methoxy-harmalan (psychostimulante) qui sont ses propres dérivés. Ses conclusions sont très intéressantes et pourraient déboucher sur une meilleure approche du traitement des troubles du sommeil ou de l’humeur, ainsi que des maladies neurodégénératives avec ces hormones. Hélas, à ce jour, elles n’ont pas été reprises par d’autres chercheurs et ne sont, de fait, pas reconnues par la communauté scientifique. A suivre donc…

Les effets anti-âge de la mélatonine

On sait que le manque de sommeil accélère les effets du vieillissement sur l’organisme. Aussi, si la mélatonine améliore celui-ci, il en découlera forcément divers effets « anti-âge ». Cependant, cette hormone intervient dans plusieurs processus où elle peut améliorer directement la vitalité et la longévité.

Sachant que la production de mélatonine diminue fortement après l’âge de 10 ans (et plus ou moins vite selon les personnes), les scientifiques ont étudié l’effet anti-âge d’une supplémentation chez les sujets vieillissants, tout comme avec la DHEA, la pregnénolone, et les hormones sexuelles. Plusieurs expérimentations ont allongé la durée de vie de souris d’environ 15 à 20% avec la mélatonine (3).

Nous ne parlons pas ici de surcharger le corps en mélatonine, ce qui s’apparenterait à du dopage. Aujourd’hui, il est largement démontré que la restauration de ces niveaux hormonaux, proches de ce qu’ils étaient pendant la jeunesse, peut améliorer de nombreux processus du vieillissement ainsi que la longévité :

– action anti-inflammatoire

La mélatonine aide à lutter contre l’inflammation chronique. Les études montrent, qu’avec un niveau trop bas de mélatonine, le risque de développer un diabète est plus important. A l’inverse, conserver des taux plus hauts réduit les effets de l’hypertension artérielle et le risque cardiovasculaire.

– action antioxydante

En tant qu’antioxydant puissant, la mélatonine protège les tissus des dégâts des radicaux libres dans les tissus (en particulier le cerveau qu’elle atteint plus facilement que d’autres antioxydants).

La peau est également protégée par la mélatonine, des processus oxydatifs tels que les taches brunes solaires liées au vieillissement. En fait, de nombreuses cellules de la peau possèdent des récepteurs à la mélatonine (4).

– vieillissement cérébral

fonctions cérébralesEn cas de manque de sommeil, la mélatonine n’est plus assez produite dans le cerveau. L’oxydation intracérébrale augmente alors dès la 3° nuit de mauvais sommeil. A cause de ce sommeil non récupérateur, les facultés de mémoire et d’apprentissage ainsi que l’humeur seront dégradées.

Chez l’animal, l’association de l’exercice physique et d’un taux de mélatonine constant a pu améliorer les marqueurs d’Alzheimer. On sait aussi que les maladies de Parkinson et Alzheimer sont associées à des taux abaissés de mélatonine.

– risque de cancer

La mélatonine joue un rôle dans la régulation des hormones sexuelles et plusieurs études ont montré l’effet protecteur contre les cancers hormono-dépendants (sein, utérus, ovaires, prostate, testicule).

De plus, les animaux a qui on a enlevé la glande pinéale et ne fabriquant donc plus de mélatonine, font plus de tumeurs cancéreuses. Dès lors qu’ils sont supplémentés avec cette hormone, ils en font moins. (5)

Il a aussi été démontré que les sujets plus exposés à la lumière artificielle pendant la nuit (par exemple ceux qui travaillent de nuit) avaient un risque plus important de déclarer un cancer, à cause de la perturbation du rythme de production de la mélatonine.

– renfort de l’immunité

La production de facteurs de l’immunité et d’anticorps est augmentée lorsque les taux de mélatonine sont suffisants, ou par la prise de mélatonine chez le sujet âgé (10). Une autre étude a montré son action protectrice sur des globules blancs soumis à un stress cellulaire chez l’homme âgé (6).

– diminution du risque d’ostéoporose

Il a été montré chez le rat (7) que l’administration de mélatonine pouvait augmenter la densité osseuse et la solidité des os. Il pourrait ainsi s’agir d’une mesure préventive de l’ostéoporose pour l’homme dans son vieillissement.

– amélioration de l’humeur

Etant produite à partir du neuromédiateur nommé sérotonine (l’hormone de la sérénité), la production de mélatonine serait liée au bon équilibre de l’humeur. Des effets sur certains états dépressifs ont été mis en évidence.

Posologie, effets indésirables et contre-indications

La dose quotidienne utile varie selon les individus, d’après leurs niveaux. En moyenne, il s’agit de 1 à 5 mg en une seule prise 1 heure avant le coucher. Nous parlons ici de la forme classique. Il existe aussi une forme dite « à libération prolongée ».

Si la dose est trop faible, les effets seront peu présents. Si elle est trop forte, alors des effets indésirables pourront apparaitre : surtout somnolence diurne, vertiges, maux de tête, troubles de l’humeur…

En traitement anti-âge seul, les doses sont souvent plus faibles : 0,3 à 0,6mg par jour.

La mélatonine est aujourd’hui en vente libre dans la plupart des pays car de nombreuses études ont démontré son innocuité. Par prudence, elle est déconseillée aux femmes enceintes et aux personnes présentant des troubles mentaux. Elle est aussi à éviter en cas de lymphomes ou leucémies. D’autre part, elle pourrait augmenter l’effet des traitements anticoagulants.

Dans les essais cliniques, les effets secondaires observés surviennent cependant avec la même fréquence que chez les personnes prenant un placebo. Donc rien de très probant.

Mélatonine et anti-âge en pratique

Nous ne parlons pas ici de récupérer le sommeil dans le décalage horaire ou de régler le rythme veille/sommeil. Ceci n’est pas spécifique à l’anti-âge, et a été largement documenté. Nous parlons d’améliorer la longévité et de maintenir au mieux sa forme physique et mentale.

Ainsi, à la question : « quand doit-on prendre de la mélatonine ?« , notre première réponse sera « quand on en manque« . On sait bien sûr que son niveau baisse avec l’âge mais pas de la même façon chez tout le monde.

Les signes de manque de mélatonine :

  • endormissement difficile et temps de sommeil trop court
  • réveils fréquents dans la nuit, difficulté à se rendormir
  • fatigue en se levant le matin
  • difficultés à se « caler » sur des horaires normaux veille/sommeil
  • humeur maussade…

Il est aussi possible d’évaluer votre niveau de mélatonine au laboratoire d’analyses :

  • en la dosant dans le sang mais il faudrait faire le prélèvement entre 2 et 3 heures du matin quand elle est secrétée à son maximum
  • en mesurant un de ses métabolites : le 6-sulfatoxy-mélatonine, dans vos urines de 24 heures, ce qui est plus simple.

Conduite à tenir

Si ces signes de carence ne sont pas marqués, et que l’état général est bon, il ne semble pas utile de prendre une complémentation en mélatonine.

Si ces signes sont présents sans plus, on peut essayer d’augmenter ses niveaux de mélatonine par l’alimentation, en augmentant ses apports et ceux de son acide aminé essentiel précurseur : le tryptophane. Celui-ci se trouve plus particulièrement dans : noix, noisettes, amandes, avocat, canard, dinde, germe de blé, oeufs, dattes, graines de sésame, graines de courge, ricotta, gibier, poulet, fromages, chocolat, avoine…

Une étude (8) montre que la pratique de la méditation transcendantale augmente fortement (entre autres) la production de sérotonine qui est le précurseur de la mélatonine.

Si cela s’avère insuffisant ou si les signes sont marqués, la complémentation peut alors être intéressante. Dans tous les cas, il faut tester le traitement, trouver sa bonne dose et juger de l’effet pour chacun. Rappelons qu’il n’y a pas de traitement standard en anti-âge, surtout avec les hormones.

De plus, les hormones interagissent entre elles, et il est préférable d’avoir les conseils d’un thérapeute qui connait bien la question et visera un équilibre hormonal global.

1 – Melatonin for the prevention and treatment of jet lag. – Herxheimer A, Petrie KJ.  – Cochrane Database Syst Rev 2002;(2):CD001520.
2 – Effects of exogenous melatonin on sleep: a meta-analysis. – Brzezinski A, Vangel MG, et al.  – Sleep Med Rev. 2005 Feb;9(1):41-50.
3 – La-melatonine-un-produit-anti-aging – Revue médicale Suisse – Maestroni G.H.M. et al., Melatonin, stress and the immune system, Pineal Research Review, 1989, 7: 203-26.
4 – Melatonin and human skin aging – Konrad Kleszczynski and Tobias W. Fischer* – Dermatoendocrinol. 2012 Jul 1; 4(3): 245–252.
5 –  Melatonin in the treatment of cancer: a systematic review of randomized controlled trials and meta-analysis. – Mills E, Wu P, et al. -J Pineal Res. 2005 Nov;39(4):360-6. Review.
6 – Melatonin Fights Age-Associated Stress Age – (Dordr) Espino J, Bejarano I, Paredes SD, Barriga C, Reiter RJ, Pariente JA, Rodríguez AB
7 – Melatonin dietary supplement as an anti-aging therapy for age-related bone loss. Tresguerres IF, Tamimi F, Eimar H, Barralet J, Prieto S, Torres J, Calvo-Guirado JL, Fernández-Tresguerres JA. Rejuvenation Res. 2014 Mar 11
8 – Serotonin, noradrenaline, dopamine metabolites in transcendental meditation-technique. –  Bujatti M, Riederer P. – J Neural Transm. 1976;39(3):257-67.
9 – Dietary factors and fluctuating levels of melatonin – Katri Peuhkuri,* Nora Sihvola, and Riitta Korpela
10 – Melatonin, immune function and aging – V Srinivasan, GJM Maestroni, DP Cardinali, AI Esquifino, SR Pandi Perumal, and SC Miller –
. 2005; 2: 17.
11 – Food Nutr Res. 2012; 56: 10.3402/fnr.v56i0.17252. – Published 2012 Jul 20.