végétaux alcalinisants

On dit que l’alimentation et le mode de vie modernes ont tendance à augmenter l’acidité du corps, surtout avec l’âge, au détriment de la santé.

Qu’en est-il ? Quelle attitude adopter ?

Article mis à jour le 20/09/2023

Certains vous diront que l’équilibre acido-basique du corps est essentiel pour la santé, que son acidification est source de nombreux troubles et maladies, et que l’on doit y veiller absolument par l’alimentation. D’autres vous diront que le corps sait très bien gérer la régulation du pH tout seul, et que les aliments n’y changent pas grand chose.

Les deux ont raison. Comme toujours, on ne peux pas dire : bien ou mal, noir ou blanc. In medio veritas ! Ils sont au moins d’accord sur un point : il existe un pH idéal qui doit être maintenu dans l’organisme.

Les fonctions métaboliques et énergétiques produisent en permanence des produits de dégradation, en grande partie des déchets acides. Le corps cherche donc généralement à éliminer un surplus d’acidité pour rester en bonne santé.

Notre organisme sait effectivement réguler l’excès d’acidité pour ce qu’on appelle le milieu extra-cellulaire (hors des cellules), en combinant les acides à des « substances tampons » essentiellement au niveau des reins (bicarbonates, phosphates, ammoniaque…), et des poumons. A l’intérieur des cellules, l’excès d’acidité peut aussi être combattu en neutralisant les acides avec des minéraux (calcium, magnésium, potassium…) ou des acides aminés.

Il apparaît donc que des aliments apportant beaucoup de minéraux et certains acides aminés aideront à maintenir cet équilibre, et à l’inverse, l’acidité est un facteur de déminéralisation et de perte de protéines. Enfin, avec l’âge, nos systèmes de régulation du pH deviennent moins performants.

Essayons d’y voir plus clair.

Cet article décrit le concept d’équilibre acide/base et, surtout, ses rapports avec l’alimentation, tel que le défendent beaucoup de praticiens de médecine fonctionnelle ou alternative, ou naturopathes. Il se veut de bon sens, se base sur des données scientifiques mais ne prend pas parti et n’affirme en rien détenir la vérité.

Certains praticiens, notamment en médecine moderne classique, réfutent ce concept, et les études scientifiques ont encore du mal à trancher. Pour vous faire votre propre idée, vous pourrez lire notre article sur la polémique autour de l’équilibre acide-base et l’alimentation.

Les causes de l’acidose de basse intensité

Différente de l’acidose métabolique grave qui met rapidement en péril l’individu, l’acidose de basse intensité pourrait s’installer à bas bruit, et dégrader lentement notre santé. Il s’agirait de très faibles variations au niveau des pH des compartiments liquides du corps (peu décelables) mais concernant plutôt les tissus sur lesquels elles se répercutent. A la longue, elles finiraient par surcharger nos mécanismes de régulation et entraîner des conséquences sur notre santé.

Les causes sont diverses : mauvaise alimentation, mauvaise respiration, mauvaise fonction d’élimination, stress, exposition aux champs électromagnétiques, sédentarité, l’âge, etc… Elles peuvent entraîner un excès de production d’acides organiques dans le corps, menant à un excès global d’acidité, et une surcharge en déchets métaboliques et toxines.

Une alimentation moderne trop acidifiante

table acide baseIl a été montré que l’alimentation moderne est trop acidifiante. En particulier, elle est devenue trop riche en sucres rapides, sodas, graisses raffinés, fromages, céréales raffinées et viandes. A l’inverse, les légumes, fruits, noix et produits complets (non raffinés) sont trop peu consommés.

Il existe un indice établi pour chaque aliment, et reflétant leur potentiel acidifiant ou alcalinisant : le PRAL Potential Renal Acid Load (cliquez sur le tableau ci-contre). Cet effet est rapidement mesurable dans les urines (1)(2).

Le PRAL prend en compte les résidus laissés par les aliments assimilés qui, selon leur nature, influencent l’équilibre acide base du corps. Il a ses limites mais a le mérite d’exister et d’être reproductible. Vous pouvez trouver une liste plus complète dans cet article.

Les autres facteurs d’acidification du corps

Le stress, le surmenage et le mauvais sommeil sont acidifiants à cause des troubles d’assimilation, des troubles de circulation, et de la mauvaise oxygénation des tissus qu’ils entretiennent.

Le manque de vitamines et minéraux : les systèmes tampons du corps qui neutralisent les substances acides produites en permanence par le corps ont besoin de vitamines, d’oligo-éléments et de minéraux (notamment Magnésium, Calcium, Potassium…), pour bien fonctionner.

Le manque d’exercice physique et la mauvaise respiration, le tabac, la pollution de l’air, font que l’oxygène manque pour métaboliser et neutraliser certains acides, de même que l’élimination du gaz carbonique CO² (un acide faible) ne se fait pas bien.

L’avancée en âge : les reins perdent leur efficacité, tout comme les poumons. Les échanges et processus d’élimination sont moins performants dans les tissus, en faveur de plus d’acidité.

De mauvais systèmes d’élimination : les reins, le foie, le colon et la peau sont des émonctoires qui doivent bien fonctionner pour éliminer les déchets acides. S’ils fonctionnent mal, l’acidité n’est pas bien compensée dans le corps.

Un déséquilibre de la flore intestinale et des perturbations digestives peuvent induire des fermentations intempestives capables de produire des acides absorbés par la muqueuse intestinale alors que, normalement, sous l’effet des sels biliaires et pancréatiques, les aliments sont alcalinisés avant leur entrée dans l’intestin grêle. Les diarrhées conduisent à l’acidose (par perte d’ions bicarbonates) alors que les vomissements la diminuent.

Notons que notre pancréas est un gros producteur d’ions bicarbonates. S’il est affaibli, cette production alcaline baisse, en faveur de l’acidité.

Les conséquences d’un excès d’acidité sur la santé

Perturbation des fonctions vitales

Les réactions métaboliques nécessitent un pH particulier pour bien s’effectuer, notamment pour que certaines enzymes soient activées et déclenchent ces réactions vitales. La modification du pH (de l’équilibre acidobasique) peut nuire, en particulier :

– aux fonctions d’assimilation des nutriments au niveau digestif et d’élimination des toxines (surtout par le foie). Les acides se lient aux protéines du tissu conjonctif comme le collagène, entraînant aussi une perte de souplesse et de perméabilité des membranes cellulaires. La microcirculation est moins bonne dans les tissus et les organes.
– aux fonctions de construction et réparation dans les cellules,
– à la lutte contre les radicaux libres (systèmes antioxydants).

Beaucoup de publications scientifiques soutiennent ces idées. Par ex. le British Journal of Nutrition de 2010 : « L’acidose induite par l’alimentation : est-elle réelle et cliniquement significative ? » (3) qui reprend un grand nombre d’études scientifiques, et aussi « l’influence de l’acidité de faible grade sur l’apparition de maladies chroniques » (6).

Il a aussi été montré que l’augmentation de l’acidité du milieu inter-cellulaire (celui dans lequel baignent nos cellules) favorisait l’apparition du cancer (7).

Cependant, on ne peut pas tout mettre sur le dos de l’acidification, comme on le lit parfois. Restons modérés, d’autant plus que certaines études viennent tempérer les publications précitées.

Le stockage des déchets acides

Si le corps est dépassé dans sa régulation du pH et son élimination des déchets acides, il peut stocker ceux-ci dans les tissus, hors de la circulation sanguine qui, elle, doit impérativement rester à un Ph très proche de 7,4. Des phénomènes comme des inflammations articulaires, tendineuses… peuvent alors apparaître (par exemple des poussées rhumatismales par des dépôts d’acide urique ou oxalique, ou encore d’acide lactique, plutôt dans les muscles…).

La déminéralisation

Des études scientifiques montrent par ailleurs qu’un excès d’acidité peut favoriser la déminéralisation (notamment l’ostéoporose) mais aussi la fonte musculaire, certains calculs rénaux, etc… En effet, nos systèmes « tampons » utilisent des minéraux alcalinisants (calcium, magnésium, potassium…) qu’ils vont puiser dans le corps (4), en particulier dans les os. De même, certains acides aminés peuvent être prélevés dans les muscles par l’organisme, pour réduire l’acidité globale.

A ce sujet, il a été montré que les personnes de plus de 65 ans qui consommaient plus de fruits et légumes (pourtant pauvres en protéines) avaient une masse musculaire supérieure aux autres, et préservaient ainsi mieux leur muscles.

Ces phénomènes concernent donc l’acidose métabolique latente (et non pas aigue) qui peut se corriger par l’alimentation (5) et l’hygiène de vie.

Notons cependant que si les apports alimentaires en minéraux et en acides aminés sont suffisants, ils sont permettent de compenser leur perte, pour compenser l’acidité.

Certains détracteurs de la théorie acide-base disent que certaines populations (Inuits, Masaïs nomades…) ont une alimentation hyper-protéinée animale (en théorie acidifiante), et sont pourtant en bonne santé. Oui mais ils vivent dans des conditions très particulières, sont physiquement très actifs, mangent des viandes de qualité, etc… Tout n’est donc pas si simple.

Les calculs rénaux

L’excrétion de calcium est bien proportionnelle à l’excrétion totale d’acides par le rein (3) et donc aux aliments acidifiants. La prise de citrates de magnésium/potassium (sels alcalinisants) a été montrée efficace contre la formation de calcul rénaux (8)(9).

Les signes de l’acidose chronique

Les signes d’acidose métabolique à bas bruit seraient :

  • fatigabilité
  • douleurs musculaires et tendineuses, crampes
  • mauvaise haleine
  • mauvaise digestion et déséquilibre de la flore intestinale
  • urines chargées et fortes en odeur
  • spasmophilie et troubles de la conduction nerveuse
  • transpiration excessive et malodorante
  • mycoses
  • migraines, dépression…

L’alimentation alcaline pour équilibrer l’acidité

legumesVoici les bases d’une alimentation pour un meilleur équilibre acide/base du corps car plus « alcalinisante« . Vous noterez qu’elles sont déjà privilégiées dans l’alimentation saine (voir ici) bien qu’on y tienne pas compte de l’acidité.

A augmenter :

  • les végétaux : surtout les légumes et les fruits,
  • les aliments frais, non conservés,
  • les fruits secs,
  • les noix (peu acidifiantes par rapport aux autres sources de protéines) et les graines germées…

A diminuer :

  • les viandes, les produits animaux, les fromages secs,
  • les céréales raffinées : farines, pâtes… les préférer complètes (non raffinées) et en quantités très modérées.

A éviter :

  • les sucres raffinés et les produits sucrés,
  • l’alcool,
  • les sodas,
  • l’excès de céréales (surtout les farines blanches raffinées),
  • l’excès de sel, de café et cacao,
  • les aliments industriels tout préparés, les huiles raffinées industrielles…

Vous trouverez plus d’information et une analyse critique sur l’alimentation alcaline ici et une liste des aliments alcalinisants là. Notez que tout cela se rapproche finalement d’une alimentation ancestrale (voire paléolithique) que l’on trouve encore chez certaines peuplades qui s’en portent très bien.

Contrôler et corriger son pH

La correction de l’équilibre acido-basique peut aider à réguler et optimiser :

  • les diverses fonctions du métabolisme de nos cellules dont la production d’énergie
  • l’apport et l’utilisation de l’oxygène au niveau cellulaire
  • les fonctions de détoxication et d’élimination des radicaux libres.

Cela se fait surtout par un changement d’habitudes alimentaires sur le long terme, mais aussi d’hygiène physique (exercice) et une meilleure respiration. Boire des eaux minérales alcalines (en dehors des repas) peut également être utile.

papier pour mesurer le Ph Pour obtenir plus rapidement un meilleur équilibre acide base, l’emploi de sels minéraux est possible. Il s’agit la plupart de temps de citrates ou bicarbonates. Voici le protocole proposé en médecine fonctionnelle ou naturopathie :

On commence avec une dose faible en contrôlant son pH urinaire. On augmente la dose si le pH n’est pas modifié après quelques jours. Ceci toujours hors des repas pour ne pas neutraliser l’acidité produite par l’estomac indispensable à une bonne digestion.

Après avoir trouvé la dose efficace pour corriger son pH (qui devrait être normalement entre 6 et 7.5 dans les urines), il faut poursuivre plusieurs mois (2 à 6 mois selon l’ancienneté des troubles et l’acidité constatée). Ensuite, on diminue la dose progressivement jusqu’à arrêter les sels alcalinisants en ayant, bien entendu, modifié son alimentation et changé quelques habitudes d’hygiène de vie.

Pour contrôler le pH des urines simplement, on peut utiliser du papier ou bandelettes de test pH. Ils doivent être gradués de 5 à 9 par demi-unités (en pharmacie).

ATTENTION, notez bien :
1. le pH des urines ne reflète pas le pH des différents tissus du corps. Il dépend surtout de l’alimentation et des efforts physiques précédents mais il a le mérite d’être simple à contrôler, et d’être globalement l’indice d’un corps cherchant à éliminer un excès d’acidité.
2. Les urines matinales sont naturellement plus acides que dans la journée. L’organisme élimine ses déchets et excès d’acides surtout pendant la nuit et cela se retrouve dans les urines au lever. Il est préférable de les exclure dans le calcul de la moyenne du jour.
3. Ce qui compte est d’
améliorer la moyenne de son pH pris aux mêmes heures. Aussi, avant de se traiter, il faut mesurer ses urines au long de la journée (3 ou 4 fois) pendant plusieurs jours pour être bien sûr(e) que l’excès d’acidité est réel et continu. Il est aussi possible de faire doser le pH des urines de 24h par un laboratoire.

Conclusion

Cette approche, bien qu’encore controversée, est néanmoins intéressante. Elle peut expliquer bon nombre de problèmes de santé et donner lieu à des mesures de prévention et de traitement dans le sens d’un meilleur équilibre acido-basique.

Alors, sans rentrer dans la phobie de l’aliment vraiment acidifiant ou alcalinisant, puisque ces mesures consistent surtout en une meilleure hygiène de vie et alimentaire, pourquoi s’en priver ?

Bibliographie :

(1) Remer T1, Manz F. Potential renal acid load of foods and its influence on urine pH. J Am Diet Assoc. 1995 Jul;95(7):791-7.

(2) Plant Foods Hum Nutr. 2010 Mar;65(1):77-82. doi: 10.1007/s11130-009-0149-5. Nutrient based estimation of acid-base balance in vegetarians and non-vegetarians. Deriemaeker P, Aerenhouts D, Hebbelinck M, Clarys P.

(3) Joseph Pizzorno, Lynda A. Frassetto and Joseph Katzinger. Diet induced acidosis : is it real and clinically relevant ? British Journal of Nutrition 2010 – 103 – 1185

(4) New & Col. (2000). Dietary influences on bone mass and bone metabolism : further evidence of a positive link between fruit and vegetable consumption and bone health ? – Am J Clin Nutr 71: 142-151.

(5) Alimentation et équilibre acido-basique. Christian Demigné, Marie-Jeanne Davicco & Véronique Coxam Unité de Nutrition Humaine – Equipe Alimentation, Squelette & Métabolisme INRA

(6) James J Dinicolantonio, James O’Keefe, Low-grade metabolic acidosis as a driver of chronic disease: a 21st century public health crisis, Open Heart, octobre 2021

(7) Kato Y, Ozawa S, Miyamoto C, Maehata Y, Suzuki A, Maeda T, Baba Y. Acidic extracellular microenvironment and cancer. Cancer Cell Int. 2013 Sep 3;13(1):89. doi: 10.1186/1475-2867-13-89. PMID: 24004445; PMCID: PMC3849184.

(8) Effect of Potassium Citrate Therapy on Stone Recurrence and Residual Fragments after Shockwave Lithotripsy in Lower Caliceal Calcium Oxalate Urolithiasis: A Randomized Controlled Trial. Tarkan Soygür, Ayşegül Akbay, and Sadettin Küpeli – Journal of Endourology 2002 16:3, 149-152

(9) Zisman AL. Effectiveness of Treatment Modalities on Kidney Stone Recurrence. Clin J Am Soc Nephrol. 2017 Oct 6;12(10):1699-1708. doi: 10.2215/CJN.11201016. Epub 2017 Aug 22. PMID: 28830863; PMCID: PMC5628726.

(10) Bess Dawson-Hughes, Acid-base balance of the diet-implications for bone and muscle, Eur J Clin Nutr., août 2020.